Remontée de l’Italie et du Covid ! (32)
Du 22 février au 17 mars 2020.
Le ferry nous débarque en Italie à Bari. Nous y trouvons une circulation un peu folle et mes parents avec mon plus “petit” frère. Ils viennent nous voir pour passer quelques jours ensemble dans un gîte un peu plus au nord. Mais la priorité, c’est d’abord de faire réparer un rayon de notre roue avant qui a cassé il y a 3 jours. Après avoir fait le tour de 3 ou 4 magasins de vélo, nous arrivons dans une petit échoppe qui répare les scooters et… les vélos ? Un binôme digne de “Laurel et Hardy” italiens sont dans la place et avec quelques gestes et l’accent italien d’Auréline, on explique notre demande. “Laurel” nous dit qu’il peut réparer et s’approche de notre vélo. Nous ne sommes qu’à moitié confiants, car notre italien a le geste un peu précipité et tremblant à cause du cumul de son âge mûr et des cafés qu’il a bu depuis l’aube. Il fini par nous rendre une roue réparée et dévoilée de manière “expresso” même si on se rendra vite compte qu’il a installé un diamètre de rayon plus fin et d’assez mauvaise qualité car vite oxydé…
Nous repartons pour un jours et demi de vélo et 140 kilomètres jusqu’au gîte où nous retrouvons ma famille et nous passons 3 jours dans ce village de Mattinata, sur l’arrière de la cheville de la botte italienne.
Nous sommes prêt à repartir vers le nord et le mot “coronavirus” s’est invité dans l’actualité. Nous sommes arrivés en Italie le jour même où le pays comptait son premier mort du Covid et la situation dans le nord de l’Italie se tend un peu. Nous avons 600 km le long de la côte adriatique pour aller chez un petit collectif de jeunes italiens installés au nord des Apennins, la météo est froide en cette fin février… alors on pédale fort pour se réchauffer.
Nous suivons plus ou moins l’itinéraire de la futur “Ciclovia adriatica” qui longera toute la côte adriatique italienne. Dans l’ensemble c’est une suite de villes balnéaires endormies par l’hiver, de barres d’hôtels souvent glauques, de vent frisquet pas toujours dans le bon sens. Nous avons aussi le droit à de jolis rayons de soleil et d’un petit déjeuné à la sortie de la tente lorsque nous dormons dans la grange d’un arboriculteur. Et deux hôtes italiens du réseau Warmshowers qui nous ouvrent leurs porte avant que nous arrivions à Fornazzano.
Une colocation perdue dans la montagne !
La journée a été longue avec beaucoup de vélo et il fait nuit lorsque nous empruntons les quatre derniers kilomètres de piste qui montent raides dans la forêt. Pietro nous accueille transpirants et nous propose de garer le vélo dans la chapelle ! Nous sommes dans une ancienne “paroisse”, une grande maison (l’ex presbytère) qui date de l’époque où ces montagnes étaient habitées et où la religion catholique était plus présente. Elle appartient toujours à l’Église catholique italienne qui la loue pour une bouchée de pain à 6 jeunes qui vivent ensemble depuis 3 ans pour les plus anciens. Des petits boulots ponctuels pour la plupart leur permettent de régler leur dépenses personnelles et sinon, ils font du troc, cultivent un gros potager, ont planté des arbres fruitiers, défrichent d’anciennes parcelles, font leur bois pour alimenter la grosse chaudière… C’est une maisonnée joyeuse, musicale et où il y a toujours quelque chose qui se cuisine pour les repas à venir.
Garage sacré pour le vélo, pâtes fraîches et promenade
Nous faisons de très belles rencontres, une étape pleine d’humanité et simplicité. Nous y aurions bien passé plus de temps mais un coronavirus fait trembler l’Italie jusqu’à des rumeurs de confinement. Il est finalement décrété soudainement pour le jour où nous avons prévu de partir. Après renseignement, nous maintenons notre départ et empruntons la route la plus directe pour la frontière française qui est à 600km de là.
Un climat de méfiance, de terreur, de “Io resto a casa”, de regards fuyants, de tête baissée, d’incompréhension s’est installé dans l’hiver italien. Nous pédalons et lorsque le moral est là, nous cherchons le regard et un échange de sourire avec les gens que l’on croise.
Zig zag et chemins improbables Rizières Des rues désertes…
A l’horizon, les Alpes apparaissent, nous passons Milan dans un calme qui ne doit pas être habituel et commençons à remonter le Val de Suza. En fin de journée, nous passons devant une petite maison où deux gars discutent. Ils nous font un bonjour jovial qui nous plaît alors on fait demi-tour pour leur demander si ils connaissent un endroit tranquille où l’ont pourrait camper.
Très rapidement, ils nous proposent de poser la tente devant la cabane qu’ils appellent “maison du peuple” et qui est un lieu ouvert issu de la lutte “No TAV” (treno alta velocita = TGV), puis finalement de dormir dans la petite cabane où un poêle à bois ronronne. Nous passons une soirée pleine de chaleur humaine autour de délicieuses pâtes aux coques. Ça fait du bien après ces derniers jours !
La topographie alpine nous offre un dernier bivouac au fond de la vallée, du côté de Oulx, magnifiquement frisquet de la toilette dans la rivière au givre du matin.
Nous sommes 16 mars 2020 et le confinement vient d’être annoncé pour le lendemain. Nous n’irons pas en vélo en Bretagne cette fois-ci. Nous réalisons que notre voyage se termine demain. On ne s’était pas trop préparés, mais la bonne nouvelle c’est que demain soir nous dormons à la ferme Vauban (rappelez-vous le printemps dernier). Et finalement c’est là-bas que nous passerons joyeusement le confinement, les mains dans la terre !
Nous partons tôt ce matin pour nous réchauffer dans la montée du col de Montgenèvre, la route est déserte, le soleil brille. Des tags dans les tunnels rappellent que ce col est un des périlleux points de passage d’exilés.
Arrivée dans la vallée de Briançon
Une station de ski déserte, une frontière, une belle descente, nous profitons des derniers kilomètres qui bouclent notre itinéraire. C’est la (presque) fin du Tandemélilots, mais le début de nouveaux projets et on arrêtera pas le vélo de si tôt 🙂
By Coco.